Vers "bardane, piège mortel"  

Identification et comportement  
   
     
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La Linotte mélodieuse (carduelis cannabina), petit fringillidé commun en Europe,  terrestre, grégaire et peu farouche vit dans les strates proches du sol avec une prédilection pour les plaines sèches, les  jachères, les landes pour autant qu'elle y trouve verdure, semences, ainsi qu' arbustes ou buissons bas.
Les jeunes reçoivent surtout des graines,  par nourrissage au jabot. La migration diurne en octobre fait suite à des mouvements erratiques à partir desquels    d'importantes volées se forment avant de descendre vers le sud.
En plumage automnal uniquement, le mâle apparaît brun chamois aux parties inférieures (1) tandis que la femelle conserve toute l'année  une tenue plus striée  (2),  les parties  supérieures des deux sexes virent  au brun roux (photos 3-4).

En vol, un panneau alaire (3a-4a-5-6) permet de l'apercevoir de loin, les rectrices peuvent également montrer une plage blanche variable suivant l'étalement de la queue (3b- 4b)
L'expression peu aimable "tête de linotte" qui qualifie une personne écervelée, étourdie, sans jugeotte fait référence au comportement de la femelle qui construit son nid dans les buissons à faible hauteur sans chercher à le dissimuler. La destruction ou le pillage l'oblige très souvent à recommencer l'édifice mais elle semble ne pas retenir la leçon   et ne prend guère plus de précautions.
 

   
Sexe  
   

Sur le terrain, avec un peu d'expérience, des conditions de lumière favorables, le sexe peut être déterminé par  l'observation  de l'oiseau. La femelle montre une teinte générale plutôt gris brun par rapport au brun roux du mâle. En automne, les plumes de la poitrine du mâle  présentent une teinte brun chamois assez uniforme (1) alors que chez  la femelle des stries plus foncées parcourent  l'ensemble de la poitrine  (2).
Au printemps, la poitrine et la calotte rouge cramoisi du mâle excluent tout  risque de confusion (19-20-21); le plumage de la femelle ne présente aucune modification.

 Pour les  juvéniles en été, les postjuvéniles et les adultes en automne, l'observation en main du liséré blanc aux rémiges primaires
P7- 9 constitue un critère fiable.
L'espace (a) entre le rachis et la plage blanche du vexille externe mesure moins de 0,5 mm chez le mâle (photo 7c) et plus de 0,5mm chez la femelle (photo 8c).
A voir également la photo ( 13 haut) qui montre l'aile d'un mâle tandis qu'en ( 13 bas) il s'agit d'une femelle.
La différence de dessin aux plumes de poitrine, constitue le meilleur critère pour les oiseaux en plumage postnuptial ou postjuvénile. (voir photo)
   
Age  
   
   
                           7
   
5   6      8
         

( 5 ). Chez l'adulte, les GC (a) montrent un vexille brun roux; seules les GC externes laissent apparaître un centre foncé; ces plumes ne présentent aucune extrémité claire.
La forme bien arrondie  des CP ainsi que la teinte noirâtre semblable au centre des  GC externes caractérisent les plumes muées .
En C l'espace réduit entre le rachis et la plage blanche constitue une indication de sexe.
( 6 ). La mue postjuvénile partielle des GC s'étend en moyenne jusqu'aux 7e ou 8e plumes internes. En (a), les deux plumes non muées montrent une frange  plus claire à l'extrémité que celle des plumes internes et il n'existe pratiquement aucune lisière brun roux bordant le centre brun foncé comme c'est le cas pour les plumes de droite.
En (b) les CP plus étroites moins arrondies diffèrent des mêmes plumes de l'oiseau adulte ( 5 ).


( 7 ). photo en haut.
La forme des rectrices constitue un bon critère complémentaire, chez un oiseaux adulte >1Y/ >2Y, toutes les  plumes apparaissent plus larges avec des extrémités arrondies.
( 8 ). photo en bas
Chez  les juvéniles et les oiseaux de 1Y/ 2Y des espèces qui effectuent une mue partielle, les plumes non muées apparaissent plus étroites et pointues R2-R6. Quelques oiseaux peuvent muer la rectrice centrale R1. 
Pour cet oiseau la forme  nettement moins pointue que R2-6 et la coloration plus brune plaide pour le remplacement naturel au cours de la mue ou à la suite d'une perte accidentelle.

 

 
Détails  
   
   

Des plumes sétiformes (9a-10b) bien plus élaborées que les simples poils des insectivores protégent les narines et les commissures. Les déchets de verdure et la terre collés  au bec (10c) montrent  que la linotte consomme de la verdure qu'elle cherche au sol. 

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La couleur des oiseaux

Dans l'ouvrage "LA COULEUR DES OISEAUX et ses mystères", Maurice Pomarède*  s'appuie sur de nombreuses observations pour expliquer le mécanisme de la création et de la distribution des couleurs dans les plumes des oiseaux.
L'aspect théorique fait appel à des notions de physique, de chimie et de biologie traitées dans un esprit de vulgarisation accessible à un public d'un bon niveau scientifique. Les exemples illustrés par des photos et des clichés obtenus au microscope électronique à balayage appartiennent presque exclusivement aux oiseaux d'élevage. Cependant les informations de base sont applicables à tous les oiseaux sauvages . L'auteur propose des explications pour le changement de couleur au printemps sans qu'une mue prénuptiale soit effectuée. Des phénomènes plus complexes que la simple usure par abrasion des plumes observés chez le Ministre (Passerina cyanea), pourraient expliquer la coloration printanière du mâle chez la Linotte mélodieuse.

* Maurice Pomaréde, agrégé de biologie, secrétaire général de la Fédération française d'ornithologie,  président de l'Amicale Internationale  d'ornithologie

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Formation de la couleur d'une plume  
   

La couleur d'une plume peut être due à  la pigmentation, la mélanisation, ou à des dispositions structurales
A) Des pigments mis en place lors de la mue proviennent
     de  l'alimentation, ils  se répartissent  principalement en
     caroténoïdes divers responsables des couleurs allant de
     l'ivoire au   rouge en passant par le jaune et l'orangé.
B) Les mélanines, protéines brunes ou noires synthétisées
     par     la   peau  migrent dans la plume par les
     mélanocytes.

C) La couleur structurale répond à des lois de physique optique, elle résulte de microparticules  qui réfléchissent ou absorbent certaines  longueurs d'ondes de la lumière. Cette disposition concerne surtout la couleur bleue et fait apparaître  des reflets irisés ou  change la teinte selon l'angle d'observation  comme chez les pigeons, l'étourneau et les corbeau.

   
Pigmentation de la plume    
 
13a
 
 
12   13b
 
14   15
   

La plume se forme dans une dépression de la peau  appelée follicule ou  papille (12) selon les auteurs. Cette zone  particulièrement bien irriguée par le sang au moment de la croissance   distribue les pigments dans la plume.
Cette distribution en quantité et en temps des pigments détermine point par point la couleur de la plume.
Pour la Linotte notamment, selon que l'oiseau est un mâle ou une femelle, la distribution du blanc qui correspond à une absence de mélanine sera différente au niveau de P7-9 (13a-13b).

  On ne peut que s'émerveiller face ce phénomène biologique qui se reproduit  un nombre incommensurable de fois avec un nombre négligeable d'erreurs .
Parmi celles-ci, un manque de mélanisation peut produire quelques plumes blanches (14).
Un manque momentané de pigmentation dû à une carence alimentaire lors du nourrissage se répercute  sur toutes les rectrices; ce phénomène est appelé barres de croissance (15). 

 
 
Le plumage nuptial de la linotte mâle
 

Le chant   des mâles constitue un signal auditif pour les oiseaux qui habitent des milieux touffus  ou qui vivent dans les grands espaces. 
Le dimorphisme sexuel peut également se manifester par une différence de couleur  et correspond à un signal visuel. Ces signaux particulièrement importants au printemps favorisent les rencontres et la formation des couples.
 

Selon les espèces, l'acquisition du plumage nuptial
    chez le mâle peut résulter.
-  d'une mue prénuptiale ( voir page gobemouches noir)
-  d'une usure par abrasion des lisières de certaines plumes
    (voir pages:  pinsons et  rougequeue à front   blanc)
-  de stratégies complexes assez mal documentées,
    notamment pour la linotte.

 

Observations d'oiseaux capturés en vue du baguage

 
16 17      Gros plans       1  2 18
   
  L'évolution entre le plumage d'automne- hiver (16-17-18)  et celui du printemps- été (19-20-21) caractérise l'espèce.
 En (16-17) les plumes de poitrine et en (18) les plumes de la calotte présentent une coloration brun chamois sans  la moindre trace de rouge apparente. 
Les gros plans (17- 1 et 2) montrent une plume face externe à gauche et face interne à droite : 
17-1. Une plume de poitrine typique du plumage automnal; elle comprend une zone duveteuse à la partie proximale tandis que la partie distale présente une structure de barbes et barbules relativement bien accrochées, elle forme le contour de l'oiseau. La teinte de cette partie va évoluer pour atteindre une teinte rouge au printemps.
.17-2 Chez certains oiseaux, quelques plumes rougeoyantes se trouvent  dispersées sur la poitrine. La littérature scientifique ne s'attarde guère sur ce sujet.
 Deux hypothèses peuvent être soulevées :
- une évolution en rapport avec l'ensoleillement exceptionnel  de septembre et octobre qui  aurait  activé prématurément la  transformation des caroténoïdes
- un taux d'hormones bien que faible aurait été suffisant pour  que le phénomène de coloration se réalise partiellement.
Il conviendrait d'étendre l'observation sur un grand nombre d'oiseaux, un appel est lancé aux bagueurs

 

         
   
19   20   21

 

   
En (19) et (20) les plumes de poitrine et de la calotte du mâle montrent les signes habituels d'usure par abrasion mais contrairement au rougequeue à front blanc le centre de la plume brun chamois au départ devient progressivement rouge.
En 21 le mélange de plumes brunes (a) et rouges (b) met en évidence un changement plus profond qui ne peut être attribué  à l'usure
Au printemps,  la femelle conserve  la même apparence .

 La teinte rouge résulte d'une pigmentation par les caroténoïdes et  ceux-ci doivent avoir obligatoirement été distribués lors de la formation des plumes (12).
Pour une raison mal connue le processus de pigmentation a été interrompu et la plume à pris une teinte brun chamois.
Cette inhibition peut être due à un élément chimique ou un phénomène biologique et elle disparaîtrait au printemps ce qui permettrait la reprise du processus de coloration par les pigments existants.
Les caroténoïdes présents depuis la mue et en "sommeil"  peuvent être réactivés soit par:
1 - l'exposition à la lumière dans les quartiers d'hiver
2 - l'élévation de température
3 - les hormones sexuelles
 Chez les femelles soumises aux mêmes conditions d'alimentation, de température et de luminosité, les hormones sexuelles inhibent les caroténoïdes, ce qui expliquerait la couleur identique toute l'année
Au printemps, les hormones sexuelles mâles  particulièrement abondantes se diffusent dans les plumes  et pourraient réactiver les pigments tout en affaiblissant la mélanine.
 Il faut noter qu' un mâle encagé en automne ou en revalidation et qui a donc bénéficié des mêmes conditions de mue que ses congénères ne rougit pas au printemps.
On peut croire que le statut forcé de célibataire influence le taux d'hormones ce qui  empêche la reprise du processus de pigmentation.

Cette hypothèse basée sur les recherches exposées dans le livre (11) propose une explication qui  sera peut-être confirmée ou infirmée, un jour, par des recherches  en laboratoire. En attendant, prenons du plaisir à observer les linottes mâles dans leur parure nuptiale.
   
   
La couleur jaune de cet oiseau provient de  lutéine absorbée lors de la mue, alors que carotène et canthaxanthine provoquent orangé et rouge vif.
La présence d'une fleur de pissenlit  sert uniquement  de témoin pour  établir la  densité du jaune.